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Histoire de Nadaillac

Nadaillac, située aux confins du Périgord Noir entre les Causses du Quercy et du Pays Corrézien, est une petite commune rurale de 2800 hectares et 340 habitants
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La paroisse de Nadaillac est signalée dès 1099 dans le cartulaire d’Uzerche. On trouve Nadailhac dans un pouillé du XIIIème siècle (tableau des bénéfices d’une abbaye ou d’un diocèse), puis Nadailhacum au XVème siècle. C’est au XVIIIème siècle qu’on précise Nadaillac-le-Sec : aucun cours d’eau ne la traverse et on n’y compte qu’une seule fontaine, la fontaine de la Belle.
Le mot provient d’un nom de personne gallo-roman suivi de « acum » : « Natalius » formé à partir du latin « Natalis » (« natal, de naissance ») et signifie « le domaine de Noël », de « Nadal » en occitan. Mais on peut penser que l’occupation humaine du territoire de Nadaillac remonte à un passé plus éloigné encore. En effet on y a découvert deux dolmens (l’un, au XIXème siècle, à quelques centaines de mètres du lieu-dit « le Lac Clar », l’autre, au lieu-dit « Le Roc de Domme », a été brisé en 1863 pour frayer le passage de la route de Nadaillac au village de la Forêt).
Nadaillac qui se trouvait dans la Comterie de Terrasson passa à la maison de Turenne vers 1074 puis changea plusieurs fois de seigneur. Jusqu’au XIVème siècle Nadaillac avait l’abbé de Saint Amand de Coly pour collateur. Aux XVIème et XVIIème siècles la paroisse faisait partie de la chastelainie et baronnie de Salignac.
Si Nadaillac n’a pas été le théâtre de grands événements, elle a participé comme beaucoup de petites communes de France à la « petite » histoire en subissant au cours des siècles les dommages liés à l’ingratitude de son sol, aux circonstances climatiques ou aux guerres. La liste des noms inscrits sur son monument aux morts, égrenée lors des cérémonies du 11 novembre est impressionnante, d’autant plus que s’y ajoutent ceux des habitants des villages de La Raymondie et de la Forêt, fusillés par les Allemands au printemps 1944.
En 1365, sous l’administration du Prince Noir, le grand recensement des feux de la sénéchaussée pour l’établissement du fouage en indique 47 (le fouage étant l’impôt perçu sur chaque feu ayant donné naissance à la taille ; par feu ou foyer on comptait 4 à 5 personnes). Ce chiffre sera à son apogée en 1720 avec 166 feux. En 1790, Nadaillac comptera 816 habitants, 930 en 1876. C’est à la fin du XIXème siècle que se développa la production de truffes, apportant une richesse certaine à la commune. Le nombre d’habitants décrut ensuite régulièrement jusqu’en 1990 où on n’en comptait plus que 285 pour remonter à 340 environ ces dernières années.
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Le bourg aggloméré a conservé au hasard de ses ruelles pavées de nombreux vestiges du passé. On peut encore observer sur le linteau de la porte d’une demeure de la rue Noire, ainsi nommée en souvenir du Prince Noir (fils d’Edouard III vainqueur de Jean le Bon à Poitiers en 1356) qui y aurait séjourné, les armes de Richard Cœur de Lion. Une ancienne maison noble du XVIème siècle présente une curieuse tourelle d’escalier octogonale, coiffée de lauzes, en forme de cloche écrasée sommée d’un champignon de pierre, et un élégant pigeonnier carré au dessus d’un portail en plein cintre. Et combien de fenestrages à meneaux gothiques ou Renaissance, de lucarnes des XVIIème et XVIIIème siècles, sans parler d’un pignon orné de baies géminées ou des lourds toits de lauzes supportés par d’imposantes charpentes de chêne…
L’église de Nadaillac, ancien prieuré-cure, faisait partie de la collation de l’abbaye de Saint-Amand-de-Coly, ce qui expliquerait qu’on ait bâti dès le XIème siècle, une telle église dans une si petite bourgade.
L’église est orientée. Sa nef barlongue (6 x 12 m) est suivie d’un chœur sous une coupole et d’une abside polygonale voûtée d’un cul-de-four. Elle est accostée au nord d’une chapelle du XVème siècle, de même au sud et, à l’ouest, d’une chapelle moderne formant porche devant un portail du XIVème siècle. La façade occidentale révèle la disparition d’un clocher-mur ou d’un système défensif, et porte la trace d’un portail roman disparu et rétabli au XVIIème siècle. De même, un portail latéral gothique du XIVème siècle s’ouvre sur la partie Sud de la nef. Le clocher carré s’élève au dessus du chœur, avec de gros contreforts. L’abside polygonale a été surmontée, probablement au XIIIème siècle, d’un bahut considérable, soudé au clocher, montant au même niveau que lui et enfermant une chambre de défense. La partie haute du clocher a été remontée au XVIIème siècle.
Cette église a été dotée à l’époque classique d’un intéressant mobilier. Le retable en bois doré et polychromé s’organise autour d’un tabernacle saillant entouré d’une guirlande sculptée de fleurs et de feuillage entre deux enroulements portant des anges adorateurs agenouillés ; au dessus un thabor soutient un dais sommé d’une croix. Des statues du XVIIème siècle, elles aussi en bois doré et polychromé encadrent l’autel (Saint-Pierre et Saint-Denys-de Paris) ou ornent les chapelles (Saint-Clair et une Vierge à l’Enfant du XVIIIème siècle). Des croix d’autel ou de procession et un grand lustre complètent ce mobilier. Enfin on peut remarquer trois bénitiers dont l’un est inclus dans le mur à droite de l’autel, un autre daté de 1738 est formé d’une vasque importante reposant sur un pied sculpté, le troisième quant à lui est de facture plus rudimentaire.
Le monument aux morts a lui aussi une histoire. Erigé en 1923, il a été inauguré en 1947 en présence du Ministre d’Etat Yvon Delbos, député de la Dordogne ; il est dû aux ateliers du sculpteur Freddy Stoll de Paris, venu en personne sur place pour le dernier coup de ciseau, par amitié pour son camarade d’évasion Bertrand Théodore Merly, Président des Combattants de 14/18 qui avaient eux-mêmes convoyé des pierres du causse pour en former le socle.
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Les hameaux s’étendant sur les collines environnantes encerclant le bourg sont non seulement riches en petit patrimoine (croix, piles de portail ou pigeonniers….) ou anciennes maisons nobles, voire petit château mais ils montrent aussi de cossues bâtisses de pierre (maisons d’habitation ou granges) qui, construites au début du XXème siècle, témoignent de la prospérité apportée par le commerce des truffes. N’oublions enfin ni le moulin à vent dont la construction remonte vraisemblablement au XVIIème siècle, selon la conception des moulins quercynois, ni la fontaine de la Belle, seule source sur le territoire de la commune.
En dehors de l’église paroissiale, il existait d’autres lieux de culte. La chapelle de Chambrazès près du village de la Raymondie est citée en 1099 dans la paroisse de Nadaillac, dans le cartulaire d’Uzerche. D’après la tradition orale, cette église aurait été détruite par les Anglais dont le nom est rappelé encore en ce lieu par « le puits des Anglais ». De même, au Nord du village des Salles, le lieu-dit « Les Gleyges » serait ainsi nommé à cause d’une ancienne chapelle où les paroissiens de Nadaillac et de Gignac (Lot), se rendaient en pèlerinage le lundi de Pâques et qui a certainement été plus d’une fois le théâtre d’échauffourées entre les deux populations ! Ce village, en effet, dépendait encore à la Révolution pour le temporel du Sénéchal de Martel, province du Quercy, et du diocèse de Cahors : tout près des Salles, sur la commune d’Estivals (Corrèze), se trouverait la « Pierre des trois Evêques », à l’origine « Puy des trois Evêques », à la limite des anciens évêchés de Limoges, Cahors et Périgueux, emplacement matérialisé et inauguré en septembre 2012 lors d’une grande fête inter-régionale réunissant les personnalités civiles et religieuses autour de la population des communes d’Estival (Corrèze, Limousin), Gignac (Lot, Midi-Pyrénées) et Nadaillac (Dordogne, Aquitaine).
La commune, située dans une plaine traversée par des coteaux, au sol principalement argilo-calcaire, présente quelques curiosités naturelles comme la grotte de la Grande Grèze, l’abîme de Leyge et, surtout, la croze à Rolland. Cette cavité, découverte dans les années 80 et enfin déblayée, apparaît déjà comme le plus profond gouffre exondé (émergé) du département ; avec plus de 1500 mètres de galeries explorés jusqu’à 120 mètres de profondeur, elle pourrait mener à la mythique rivière souterraine du Coly dont le nom fait rêver de nombreux spéléologues depuis cinquante ans…
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Mais Nadaillac ne vit pas seulement dans les souvenirs d’un passé qu’elle a su certes préserver ou restaurer avec un souci constant d’authenticité : elle offre aussi à ses habitants et aux touristes qui savent s’y arrêter tous les services d’une commune résolument moderne où il fait bon vivre.

Martine Cessac